Rendons à César ce qui appartient à Cesar : un de nos anciens CT d’aviron, Claudie Jacquier avait de bien belles métaphores (comme le bouillon de Nathalie Thévenez qui tourne encore après le pont, mais ce serait trop compliqué à expliquer aux non-initiés de la pratique du canotage) avec entre autres celles-ci pour tenter de nous expliquer qu’on n’est pas tous logés à la même enseigne sportivement parlant depuis notre naissance : quand on nait avec une VO2 de poisson rouge, on est avec une VO2 de poisson rouge. Cela peut s’appliquer aussi à ma récente course en trail, tout trailer que je ne suis pas …
Tout avait pourtant bien commencé. Levé 3h pour un départ à 5h. L’ambiance de départ est sereine, les SAS de départ se remplissent avec intelligence selon le temps estimé : je rentre dans celui de 12-13h. De la plage d’Albigny jusqu’aux premiers pourcentages ascendant : 3km plat pour se mettre en jambe et trouver sa place. Il fait encore nuit et dans cet environnement de racines et de cailloux je trébuche dès les premiers hectomètres en tombant le genou contre terre : ça fait mal, et cette douleur me tiendra compagnie pendant tout mon périple surtout quand j’ai besoin de plier, pas tant à l’effort. L’avantage de courir dans le Semnoz en course, est que là au moins je ne me perds pas !!! L’arrivée au sommet est faite au bout de 2h30 de course : un bisou à Greg et Mathias, 2-3 trucs salés et je repars en 176ème position.
La deuxième plaisanterie du jour après cette descente ou je brillerai par ma prudence, est la montée du Col de la Cochette, toute en gadoue et en gros caillou sur la fin qui surprendra beaucoup de monde. Je gère toujours. Quelques raidillons et km plus tard j’arrive au 2ème ravito de Doussard ou je croise notre photographe du Team UP2 à Hawaii en 2014 Eric Legrand et toute ma horde de supporter. J’avais donné mon ravitaillement perso de la deuxième partie à Marie qui me le donne avant que je passe un peu de temps à manger autre chose que des gels et des barres. J’en profite aussi pour faire une erreur stratégique dont je ne me rends pas compte : je ne sors pas ma poche à eau du sac pour la remplir et pense qu’elle est pleine quand l’eau déborde : erreur !!! Je repars en direction du Col de La Forclaz puis le Pas de l’Aulp en 90ème position à vive allure après 5h30 d’effort. Il reste 40km.
La fin de cette ascension sonne le début de mes difficultés : ma stratégie alimentaire atteint ses limites. J’avais fait sonner la Garmin toutes les 15min : 1 fois je bois 1 fois je mange en alternant gel Etixx citron, gel Etixx cola, demi barre de Power Bar Amande ou Cacahouète. Et bien là c’est la barre qui ne passe plus : je mâche mais n’ai pas envie d’avaler ce truc pâteux. Arrivé au chalet de l’Aulps commence la montée du Pas de l’Aulps derrière les Dents de Lanfon : pas un moment plaisant pour moi. Je suis dans le dur et m’assieds une fois pour reprendre mes esprits avant d’atteindre le point culminant. La descente vers Bluffy est très pentue et beaucoup trop technique pour le routard que je suis. J’essaie de manger mais l’erreur de la poche à eau apparait : plus d’eau. Impossible de manger et plus d’eau et j’en chie. Je marche presque toute la descente. Je craque en passant vers les torrents pour boire quand même. A Bluffy une rampe à eau. Je sors de la poche et la rempli correctement avant de continuer la descente vers Menthon. Gros ravito. Je prends le temps. Je suis sec. Et rerempli ma poche à eau.
Il reste 14km et cela fait 10h que j’arpente ces sentiers escarpés. La fin est pour moi une véritable punition. La montée au Col de Contrebandiers est interminable, difficile et technique. Toute comme la traversée Mt Barron Mt Veyrier dans les caillous et les racines où je ne suis pas à l’aise. Il faut en plus redescendre dans un chemin peu praticable où je marcherai aussi pas mal. Musculairement je suis plutôt bien : pas mal aux quadris. Les tendons d’Achille sont un peu plus sensibles en courant. Mais qu’est-ce que j’ai mal aux pieds !!! Je sens que quelques ampoules font leur apparition ... j’aurai mis 3h20 pour me sortir de dernier piège. Pour 14km. C’est long.
Dernier km au plat pour finir ce tour. 13h20 au total : 90ème au général. Il fallait quand même le faire. 12h n’étaient probablement pas faisables. Pour avoir un meilleur temps et moins de difficultés il faudrait que je trouve une meilleure stratégie alimentaire surtout sur du semi autonomie (3 ravitaillements solides sur 84km), et plus travailler des longues portions montantes et descendantes techniques pour moins les subir. Je crois que la préparation était bonne car même ce matin je n’ai pas mal aux cuisses, mais qu’est-ce que j’ai mal aux pieds et aux psoas !!! J’aurais bien aimé me peser après la course : je pense que mon niveau de déshydratation était élevé. Avec tout ce que j’ai bu hier pendant et après la course, il me manque quand même 3kg ce matin à la pesée. Les 5% de perte de poids de corps ont été dépassés je pense. En plus de 13h de course, je n’ai fait que 2 pauses pipi. Pas terrible …
Sur des courses aussi longues, même si je suis extrêmement concentré sur mon épreuve, l’esprit vagabonde et à la fin c’est lui qui décide de tout. J’ai bien pensé à vous qui me suivez dans mes périples et petites histoires que j’aime bien raconter. J’ai eu beaucoup de plaisir à rencontrer ceux qui étaient venus me voir depuis le départ à 5h, aux ravitaillements du Semnoz, de Doussard et de Menton, avant la montée au Contrebandiers et à l’arrivée. Je ne sais pas encore quelle sera la suite de la saison mais je vous tiendrai informés.
D’ici là portez-vous bien, je vous embrasse bien fort, surtout si vous arrivés au bout de ce énième récit : vous êtes mes Ultra lecteurs !!!